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Dimanche 28 février : L’ENFER D’HENRI-GEORGES CLOUZOT (Festival CSF 2010)

Dimanche 28 février 2010 - 20h 30 - Cinéma Mercury - Nice
Publié le dimanche 28 février 2010.


Les tournages de L’Enfer

Le film de Serge Bromberg et Ruxandra Medrea.

La rencontre fortuite, dans un ascenseur en panne, de Serge Bromberg avec la veuve de Henri-Georges Clouzot, Inès de Gonzalez deuxième épouse du cinéaste, donnera à celui-ci l’idée de la création du film que vous présentons en clôture du Festival. L’histoire ne dit pas s’ils montaient ou descendaient. Personnellement je préférerais la montée, ne serait-ce que symboliquement, car cette rencontre a permis d’exhumer l’œuvre défunte et de porter au grand jour les 185 bobines. Nos deux réalisateurs iront, au delà des quinze heures de film tournées puisqu’ils en extrairont des séquences, rechercheront des témoins de l’époque du tournage : assistants de réalisations comme Costa Gavras et Bernard Stora, script et techniciens et inséreront des dialogues extraits de cinq scènes du scénario et récités par deux acteurs contemporains, Bérénice Béjo et Jacques Gamblin. Ce travail participera d’une plus grande continuité narrative du film. Il faut en effet savoir que si les images étaient dans un excellent état de conservation, cela n’était pas le cas de l’enregistrement des dialogues qui, eux, avaient tout bonnement disparus.

Le film d’Henri-Georges Clouzot

Nous sommes au début des années soixante et Clouzot est l’un des cinéastes français les plus respectés de part son œuvre. Il obtient de La Columbia un budget illimité et les pleins pouvoirs. Le sujet du film sera ‘La Jalousie’. Il cherchera alors une idée de réalisation en adéquation avec l’époque, une forme nouvelle, techniquement parlant, mais il ne souhaite pas se rapprocher des cinéastes de la Nouvelle Vague. Il va donc entamer des recherches techniques tant sonores que visuelles et s’attachera les services de Gilbert Amy et Jean –Louis Ducarme, en relation avec Boulez, Xenakis et Stockhausen. La bande son sera le fruit de ces rencontres. La partie visuelle reposera sur des procédés photographiques, des recherches cinétiques et chromatiques, car le tournage s’effectuera à la fois en couleurs et en noir et blanc. Ses idées de mélanger le cinéma traditionnel et expérimental auront pour effets de créer une machine infernale qui l’engloutira progressivement car il sera alors incapable de par son état psychique, son manque de lucidité et de créativité, de mener à bien son projet avec lequel il sombrera.
Lors d’une croisière en Méditerranée sur le yacht de Sam Spiegel, producteur d’origine polonaise, avec qui Clouzot avait travaillé en Allemagne, Sam réserve une surprise de taille à Clouzot en lui présentant la fille de Magda Schneider, Romy Schneider. Clouzot est immédiatement touché par cette jeune fille qui semble éprouver le même désarroi que lui face aux mystères de l’amour. Romy déclara :
« Les choses ont pris, avec lui, un tour comparable à ce qui s’est passé avec Visconti. Du jour au lendemain et sans qu’y paraisse la moindre trace d’érotisme, je me suis éprise de cet intellectuel au tempérament autoritaire et provocateur, capable de conduire un acteur aux limites de ses performances. »

L’enfer des tournages

Le tournage de L’Enfer s’effectuera en deux temps puisqu’une fois le scénario bouclé Clouzot commencera à faire des essais, de nombreux essais, au total cent quatre-vingt. Romy sera la vedette lors du tournage à huis-clos dans les studios de Billancourt avec la participation ponctuelle de Serge Reggiani. Paillettes, huile d’olive et peinture seront utilisés sur le corps et le visage de l’actrice pour réaliser ces effets révolution-naires et donner l’image d’un désordre mental. Clouzot veut en effet que la forme soit indissociable du fond. Il travaille également sur le dialogue en demandant à Serge Reggiani de parler à l’envers mais, non content du résultat, il modifiera le son de sa voix. Puis, le tournage s’effectuant en anglais, il reprochera à Romy son accent autrichien et souhaite qu’elle ait le même accent que Serge.

Nous sommes en juin, Clouzot subit un choc affectif en apprenant le décès de Suzanne, sa mère, et des ennuis de santé viendront ensuite le perturber. Le tournage en extérieur doit commencer début juillet.
C’est dans le Cantal, à Gabarit, au bord d’un lac, que vont s’effectuer les scènes d’extérieurs. L’utilisation de lentilles et les effets de maquillages lors de ces extérieurs venaient compléter le travail réalisé en studio afin de provoquer une vision fantasmagorique de la jalousie. Il fait une très forte chaleur et toute l’équipe du film souffre de ces conditions climatiques. Clouzot a à sa disposition trois équipes de tournage au complet, toujours prêtes mais n’en utilisera qu’une. S’installe ensuite une période mauvais temps qui contraint l’équipe à accélérer le tournage car l’E.D.F souhaite vider le barrage. Une santé chancelante et l’ensemble des contrariétés techniques perturbent le réalisateur qui se laissera emporter par un tourbillon, une spirale infernale. Il perdra le fil de l’histoire et tournera sans cesse les mêmes scènes jusqu’à l’épuisement de toute l’équipe. Dans ces conditions, le tournage qui devait s’étaler sur plusieurs semaines n’excédera pas quinze jours.

Au milieu de tout ce chaos, on peut découvrir sur les images une Romy solaire comme rarement il a été permis de la voir. A l’inverse, Serge n’en peut plus, il est à l’image de son personnage, usé physiquement et psychologiquement, et ce sont ces raisons qui le feront abandonner le tournage et non pas, comme il fut évoqué, une fièvre de Malte provoquée par la consommation d’un fromage corse qu’il s’était fait expédier (du fromage de brebis dans la croix de Malte, rouage essentiel au bon fonctionnement d’un projecteur, c’est à croire que le film ne devait pas voir le jour) les techniciens et projectionnistes apprécieront.
Pour remplacer Serge Reggiani, il sera fait appel à Jean Louis Trintignant mais celui-ci n’effectuera aucune prise, et l’infarctus d’Henri-Georges Clouzot parachèvera cette descente aux enfers. Nul ne sait ce qu’aurait pu être le film mais peu importe car ce qui nous est donné à voir remplit les fonctions premières du cinéma : hypnotiser et rêver.

Hervé Goitschel

La séance est précédée d’une présentation et suivie d’un débat avec le public.
Animation : Hervé GOITSCHEL.

Notez que CSF s’astreint cette saison à commencer ses séances à l’heure !
Veillez donc à arriver suffisamment à l’avance pour être dans votre fauteuil à 20h 30 précises...

N’oubliez pas la règle d’or de CSF aux débats : La parole est à vous !

Entrée : 7,50 € (non adhérents), 5 € (adhérents, chômeurs).
Passe Festival pour 4 films :20 € (non adhérents), 16 € (adhérents)

Adhésion : 20 € pour un an (365 jours) - 15 € pour les étudiants. Donne droit au tarif réduit à toutes les manifestations de CSF, ainsi qu’à toutes les séances du Mercury (hors CSF) et à l’accès (gratuit) au CinémAtelier.
Toutes les informations sur le fonctionnement de votre ciné-club :
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Contact mail CSF : cinemasansfrontieres@free.fr
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Contact téléphonique Mercury : 08 92 68 81 06 / 04 93 55 37 81.