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Vendredi 05 mars : MOTHER

Vendredi 05 mars 2010 - 20h 30 - Cinéma Mercury - Nice
Publié le lundi 1er mars 2010.


Film sud-coréen de BONG Joon-ho - 2009 - 2h10 - vostf
avec KIM Hye-ja (la mère), WON Bin (Do-joon)

Une veuve élève son fils unique Do-joon qui est sa seule raison d’être. A 28 ans, il est loin d’être indépendant et sa naïveté le conduit à se comporter parfois bêtement et dangereusement ce qui rend sa mère anxieuse. Un jour, une fille est retrouvée morte et Do-joon est accusé de ce meurtre. Afin de sauver son fils, sa mère remue ciel et terre mais l’avocat incompétent qu’elle a choisi ne lui apporte guère d’aide. La police classe très vite l’affaire. Comptant sur son seul instinc maternel , ne se fiant à personne, la mère part elle-même à la recherche du meurtrier, prête à tout pour prouver l’innocence de son fils... Présentation du film et animation du débat avec le public.
Animation : Philippe SERVE.

BONG JOON-HO, L’INSOLENTE SANTE D’UNE CINEMATOGRAPHIE COREENNE PASSIONNANTE

par Philippe Serve

Bong Joon-ho, peut-être le réalisateur coréen le plus passionnant du moment, n’eut guère de chance lorsque sortit son premier long-métrage, Barking Dogs Never Bite . Son film fut littéralement noyé dans la vague, ô combien spectaculaire, qui déferla sur le monde au premier semestre 2000 en provenance du pays aux matins calmes et relayée par les plus grands festivals. Comment se faire remarquer, pour un premier film, face aux succès de Peppermint Candy (Lee Chang-dong), Chunyhang (Im Kwon-taek), L’Île (Kim Ki-duk), La Vierge mise à nue par ses prétendants (Hong Sang-soo) ou Fantasmes (Chang Sun-woo), sans compter le carton local de The Foul King (Kim Jee-woon) ?
Néanmoins, ceux qui le virent à l’époque – l’auteur de ces lignes en fit partie – apprécièrent l’humour parfois très noir du cinéaste et une faculté à rendre des personnages très vite attachants sans pour autant recourir à des ficelles éculées. Cette comédie dramatique, à moins qu’il ne s’agisse d’un drame comique – sans grande prétention mais bien décalée – a d’ailleurs su gagner de plus en plus de partisans avec les années, notamment à la suite du succès des trois opus suivants du cinéaste. C’est qu’on trouve déjà dans ce Barking Dogs Never Bite (littéralement, Chiens qui aboient ne mordent jamais) tout ce qui fera la force et l’originalité des films suivants, en mode encore mineur certes mais prometteur d’un bel avenir.


Barking Dogs Never Bite

Dès son deuxième film, Memories of Murder (2003), Bong Joon-ho décrocha la timbale du succès, international qui plus est, en particulier en France et aux Etats-Unis. Bénéficiant d’un engouement de curiosité de la part du public coréen car adaptant un fait divers sanglant – l’histoire d’un serial killer coréen jamais attrapé et qui avait défrayé la chronique locale dans les années 80 avec à la clé dix viols et meurtres de femmes – le film fit l’effet d’un coup de tonnerre. Vu par plus de 5 millions de Coréens, ramassant quatre Césars locaux dont ceux du meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur acteur, sauvant à lui seule la maison de production Sidai au bord de la faillite, Memories of Murde r, adapté d’une pièce de théâtre et de témoignages de policiers ayant suivi l’affaire, s’avéra un régal pour tout spectateur. A la fois horrifique et drôle, forçant sans cesse le public à se poser des questions – à l’opposé des films hollywoodiens du même genre qui jouent au contraire sur la passivité complice du public – le film démontrait un vrai talent de mise en scène ainsi que dans la direction d’acteurs. Battant le record coréen du nombre de lieux de tournages différents pour un seul film, Memories of Murder marqua aussi les esprits par sa qualité visuelle, de la superbe photographie aux cadrages toujours parfaits. Forcément, après un tel succès, l’attente fut immense et chacun se demanda si le jeune cinéaste de 34 ans allait pouvoir confirmer avec son film suivant.


Memories of Murder

Le résultat dépassa toutes les espérances. The Host (2006) marqua un vrai tournant dans l’histoire du cinéma coréen en inaugurant un genre prolifique au Japon mais inconnu jusque là localement, le film de monstres. Ramener l’œuvre uniquement à ce niveau – ce qui lui assurerait déjà les plus grands éloges- serait cependant trop réducteur, le thème principal du film étant l’étude d’une famille modeste et banale confrontée à une situation exceptionnelle. S’y ajoute une vraie réflexion politique sur la présence militaire américaine en Corée et, naturellement, un film d’action avec suspense. Présenté et acclamé à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes, The Host , à l’important budget (à l’échelle coréenne) de 12 millions de dollars, est très révélateur de la démarche cinématographique de Bong Joon-ho : se frotter aux films de genre pour mieux en faire reculer les frontières, intérêt qu’il partage avec d’autres cinéastes coréens tels que ses amis Park Chan-wook (la trilogie de la vengeance dont Old Boy) ou Kim Jee-woon (Deux Sœurs, Le Bon, la brute et le cinglé). _ Philosophiquement et politiquement passionné par le thème du chaos – terme qu’il associe volontiers au contexte social et culturel de la Corée du Sud – Bong Joon-ho y oppose la solidarité des petites gens et le sens du sacrifice du faible pour le plus faible que soi. La famille du film fait tout pour sauver la petite fille des pattes du monstre mais elle, elle lutte pour qu’un enfant plus jeune encore puisse survivre. Bong Joon-ho excelle dans The Host à décrire une vraie famille composée de vrais gens avec de vrais défauts et de vraies qualités. Cette constance de la vérité au sein du portrait collectif nous les rend de suite très attachants et inoubliables. Le public coréen ne s’y est pas trompé en envahissant les salles du pays (13 millions d’entrées, plus d’un Coréen sur quatre !) pour ce qui est sans doute le meilleur film du genre depuis le premier volet de la saga Alien. L’un des mérites de The Host aura été de montrer qu’un film dit de monstre peut aller bien au-delà de son genre et s’affirmer comme un remarquable film d’auteur.


The Host

Après un intermède en forme de film à trois, Tokyo ! , tourné conjointement avec Léos Carax et Michel Gondry, chacun racontant une histoire à sa façon sur la capitale japonaise, Bong Joon-ho revient à un cinéma plus modeste dans ses intentions – surtout plus intimiste - mais tout aussi maîtrisé avec Mother.

D’une histoire dramatique, le cinéaste tire une fois de plus un film déconcertant, qui ne cesse de prendre le spectateur à contre-pied. Ne reculant jamais devant les excès formels mais seulement pour mieux en pervertir les clichés et provoquer ainsi le rire, Bong Joon-ho met à nouveau en scène, comme décrit plus haut, de petites gens aux prises avec l’inattendu. Ces gens, s’échinant à des gestes héroïques afin de sauver ceux qu’ils aiment – ici, la mère du titre envers son fils – ne peuvent que trébucher en route face à leurs propres limites. Ces anti-héros forcent notre sympathie même lorsque pas grand-chose ne les rend attrayants à la base. L’humour noir – Bong Joon-ho préfère le terme amer - et absurde qu’ils provoquent ou dont ils sont victimes renforcent cette proximité très humaine.

Mother pratique les désormais traditionnelles et très brusques ruptures de ton, marques de son auteur, parfois à l’intérieur d’un même plan. Tour à tour et tout à la fois comédie, drame et thriller, le film bénéficie de la fantastique interprétation de Kim Hye-ja dans le rôle principale. Icône de la télévision coréenne depuis 40 ans, symbolisant pour tout un peuple la mère parfaite, elle se montre au diapason même de ce mélange de genres er d’émotions qu’aime tant à pratiquer Bong Joon-ho. Il faut dire que le film a été spécialement écrit et tourné pour elle. Ceci explique sans doute cela...


Kim Hye-ja dans Mother

Philippe Serve

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