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Les Tortues volent aussi

Vendredi 1er avril - 20h45 - Cinéma Mercury
Publié le vendredi 1er avril 2005.


de Bahman Ghobadi (drame, iranien, 2003, 1h35)

avec Soran Ebrahim, Avaz Latif

Dans un village du Kurdistan irakien, à la frontière de l’Iran et la Turquie, les habitants cherchent activement une antenne parabolique pour capter des nouvelles par satellite, car nous sommes à la veille de l’attaque des Américains en Irak...

Un garçon mutilé, venant d’un autre village, accompagné de sa petite soeur et son enfant, en fait la prédiction... La guerre s’approche de plus en plus...

Compte-rendu du débat :

La projection de ce film ouvrait une série de séances que CSF consacre à l’enfance et l’adolescence en prise avec la guerre (1). Or, le débat s’est engagé précisément sur le sentiment exprimé par les spectateurs que le film nous rend sensible ou « réelle » la guerre en Irak, en nous racontant la vie d’une bande d’enfants dans un camp de réfugiés kurdes, à la frontière de l’Irak et de la Turquie. Il montre comment les enfants survivent à la guerre, dont ils sont les premières victimes, par mille stratagèmes de débrouille. On peut penser à un autre aspect de la vie des enfants en temps de guerre que n’évoque pas ce film : le phénomène des enfants-soldats. Sans aucun misérabilisme, le film de Ghobadi représente les souffrances de ces enfants, les violences dont ils sont victimes, mais aussi leur propre cruauté et leur violence.

L’animatrice (Josiane Scoliéri) remarque l’interrogation qui court dans le film sur « les nouvelles ». Faut-il croire les médias, les nouvelles de CNN (quitte à les traduire très librement...) ou les prédictions du jeune manchot ? Quelle différence, finalement, entre les deux ? Plus qu’une mise en question de ce qui vaut comme information et comme événement dans l’univers dévasté d’un camp de réfugiés, ces moments du film sont aussi une manière d’évoquer l’interdit religieux sur les images - interdit avec lequel le cinéma iranien contemporain doit composer.

Le débat se concentre ensuite sur la question des mines anti-personnelles. Pourquoi y a-t-il tant de mines dans cette région du Kurdistan irakien, et pourquoi sont-ce les enfants qui déminent, demande une spectatrice ? Cette région a été dévastée a plusieurs reprises : par la guerre Iran-Irak d’abord, de 1980 à 1988, puis par la première guerre du Golfe et par le soulèvement des Kurdes écrasé par Saddam Hussein. Et les enfants, plus habiles que les adultes et probablement moins conscients du danger, trouvent dans le déminage un moyen de subsistance.

Le film parvient à être fidèle à cette réalité en reconstituant la vie quotidienne dans un camp de réfugiés. Le public a été frappé par l’absence des adultes, et en particulier des mères, dans la société que peint le film ; une société d’enfants, avec son chef et ses ordres...

Dans cette société, le viol représente une telle honte que le personnage de la jeune fille préfèrera faire passer son enfant pour son frère. Et l’issue de son drame sera nécessairement tragique.

Elise Domenach

(1) CSF proposera sur le même thème "L’Enfance d’Ivan" de Andrei Tarkovski dans le cadre de son Festival de Printemps consacré aux "Grands Premiers Films" (26 mai-4juin)

Le film sera précédé d’une présentation et suivi d’un débat avec le public.

Animation : Josiane Scoléri


Affiche du film © Bac Films - Cliquez pour agrandir

Texte-programme - Texte-programme présentant le film, plus compte-rendu de la séance Vera Drake.