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VENDREDI 23 SEPTEMBRE 2016 : SIERANEVADA

20h30 Cinéma Mercury - 16 place Garibaldi - Nice
Publié le lundi 19 septembre 2016.


Film de Cristi Puiu

Roumanie - 2016 - 2h53

Quelque part à Bucarest, trois jours après l’attentat contre Charlie Hebdo et quarante jours après la mort de son père, Lary - 40 ans, docteur en médecine - va passer son samedi au sein de la famille réunie à l’occasion de la commémoration du défunt. L’évènement, pourtant, ne se déroule pas comme prévu. Les débats sont vifs, les avis divergent. Forcé à affronter ses peurs et son passé et contraint de reconsidérer la place qu’il occupe à l’intérieur de la famille, Lary sera conduit à dire sa part de vérité.

Sieranevada a commencé à germer dans la tête du réalisateur Cristi Puiu en 2012, durant le Festival de Sarajevo : "Mirsad Purivatra, le directeur du festival m’appelle et me demande si j’ai un scénario. Non, je n’ai pas de scénario, mais je vais en écrire un. Ce sera un huis clos. Il y aura de nombreux personnages", confie le réalisateur. Cristi Puiu a choisi le titre Sieranevada à cause d’une réflexion qu’il se faisait : pourquoi les titres changent selon les nationalités ? "Ça m’énerve tellement. Au départ je me suis même dit : « je vais faire moi-même les titres pour chaque langue ». Et puis j’ai tranché pour un titre qui ne peut pas être changé", raconte le cinéaste. Normalement, le mot Sierra Nevada est séparé mais pas dans la langue roumaine. Puiu a ensuite décidé de lui enlever un "R" afin de susciter la recherche d’un sens chez les spectateurs : "Que des gens (...) viennent me dire sur le tournage : « cela ne s’écrit pas comme ça », ça m’a plu. Mais la vérité, au fond, c’est que : on s’en fout ! Mais notre cerveau a un tel besoin de sens qu’il va construire du sens là où il n’y en a pas, où il n’y a rien. En réalité n’importe quel titre peut convenir, mais ça on ne peut pas le dire, donc il faut livrer un titre et c’est celui-là ! C’est une question personnelle, c’est un titre qui est apparu dans ma tête. Comment il est apparu ? Ça, c’est mystérieux, et beaucoup de choses sont mystérieuses. (...) Le titre Sieranevada possède des résonances de western, même s’il n’y a pas de western célèbre qui porte ce titre. Ça évoque la neige, une autre langue : l’espagnol, la musique de cette langue. Sieranevada, c’est beau", affirme le réalisateur.

Le cinéaste Cristi Puiu a construit son scénario à partir de sa propre expérience, celle de la mort de son père et la commémoration qui s’en est suivie, en 2007 : "Des années plus tard, j’en parle avec mon frère, je lui dis : « j’écris un scénario sur la commémoration de Papa, tu te souviens comme on s’est engueulés à propos du communisme ? » Mon frère qui avait participé à ce débat enflammé, me répond qu’il ne se souvient de rien. Pourtant la discussion a été si animée que cette femme a fini par quitter les lieux ! Je commence à exprimer ma version des faits à mon frère, qui persiste : « excuse-moi, mais je ne me souviens vraiment pas de ça ». Ça m’a rendu malade, fou furieux, parce que je voulais qu’il me donne des détails supplémentaires. Ça m’a pas mal déprimé. Donc, parfois on retient ou on enregistre différemment les choses", se souvient le metteur en scène.

Sieranevada comprend un débat enflammé à propos des attentats du 11 septembre 2001, notamment à travers un personnage dont nous parle Cristi Puiu : "Il est perturbé par tout ce qui se dit autour de cet événement et il a raison de l’être dans le sens où il faut discuter de tout. Mais lorsqu’il construit son raisonnement avec des éléments dont certains sans doute conspirationnistes, trouvés sur internet, là il a tort. Plus généralement, on ne sait jamais qu’une parcelle de la réalité dans l’Histoire. On ne peut pas trouver de réponses définitives", affirme le réalisateur. À noter que ce dernier avait 23 ans quand le Mur de Berlin est tombé et qu’il a connu deux versions de l’Histoire, celle du bloc communiste puis une autre version des faits à l’effondrement du communisme : "Avec lui une Histoire a disparu, et aussitôt une autre Histoire a surgi, une autre version des faits. Des choses que je ne connaissais pas, moi qui ai beaucoup aimé l’Histoire. J’étais vraiment bouleversé", explique le cinéaste. Quasiment tout Sieranevada se déroule dans un appartement, en huis-clos : "On vit dans un monde dont on connaît les limites. Ce qui veut dire que le film ne peut pas être conçu autrement que comme un monde en soi, géographiquement limité. C’est pour ça que l’espace est fermé, que cela se déroule dans un appartement en vase clos. Cet espace est la réflexion d’un miroir du monde à l’échelle réduite", analyse Cristi Puiu.

L’appartement qui a servi de décor à Sieranevada appartenait à un homme décédé depuis 40 jours et dont on venait de commémorer le décès. L’homme en question vivait avec deux chats au milieu de toiles d’araignées, dans la poussière. L’équipe du film a gardé de nombreux éléments de l’habitation dont du mobilier, des tableaux et la photo du propriétaire qu’on peut voir plusieurs fois à l’image : "Le grand avantage de ce lieu était que l’on pouvait imaginer la trajectoire des personnages dans un espace où très vite on intègre les frontières, les limites de chaque pièce qui renferment toutes un monde. Tout un concert de portes qui s’ouvrent et qui se ferment. Les portes sont très présentes dans le film. Ce ne sont pas seulement des portes qui s’ouvrent pour laisser passer, ce sont des portes qui enferment aussi, qui empêchent. Cela construit visuellement mon histoire", confie Cristi Puiu. Cristi Puiu a voulu placer sa caméra à hauteur d’hommes afin de placer le spectateur dans la position du regard du mort, celui qui est commémoré dans le film : "Dans la tradition orthodoxe, l’âme du mort est en liberté pendant quarante jours, elle bouge. Je me suis posé la question de comment faire pour raconter l’histoire à travers les yeux du mort qui circule ? En mettant la caméra à la place du mort, cet homme invisible. C’est ce que j’ai voulu voir, c’est le regard du mort", relate le réalisateur.

Sieranevada a été sélectionné en Compétition officielle au Festival de Cannes 2016. Le réalisateur roumain Cristi Puiu a déjà été membre du Jury Un Certain Regard lors du Festival 2007. Il a également reçu le Prix dans cette même section en 2005 pour La Mort de Dante Lazarescu.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Bruno Precioso

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