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VENDREDI 09 SEPTEMBRE 2016 : L’EFFET AQUATIQUE

20h30 Cinéma Mercury - 16 place Garibaldi - Nice
Publié le vendredi 2 septembre 2016.


Film de Solveig Anspach

Islande - 2016 - 1h25

Samir, la quarantaine dégingandée, grutier à Montreuil, tombe raide dingue d’Agathe. Comme elle est maître-nageuse à la piscine Maurice Thorez, il décide, pour s’en approcher, de prendre des leçons de natation avec elle, alors qu’il sait parfaitement nager. Mais son mensonge ne tient pas trois leçons - or Agathe déteste les menteurs ! Choisie pour représenter la Seine-Saint-Denis, Agathe s’envole pour l’Islande où se tient le 10ème Congrès International des Maîtres-Nageurs. Morsure d’amour oblige, Samir n’a d’autre choix que de s’envoler à son tour...

Article de Josiane Scoleri :

L’effet aquatique, dernier film de Solveig Anspach, est une comédie d’une légèreté rare et d’autant plus bienvenue en ces temps troublés . Une comédie sentimentale comme aux meilleurs temps d’Hollywood, la loufoquerie en plus. Gageons que cet humour scandinave en décalage permanent n’est pas pour rien dans le bain rafraîchissant que nous procure L’effet aquatique. Nos deux héros ont beau être des Français ordinaires bien d’aujourd’hui , bien de chez nous et plus précisément de Montreuil, leur petit grain de folie a un je-ne-sais-quoi d’exotique qui fonctionne à plein, et peut-être plus encore en Seine-Saint-Denis qu’en Islande.

Avec ce dernier film, Solveig Anspach creuse et affine la veine de ses films précédents et prend visiblement grand plaisir à filmer avec réalisme, souvent même plutôt au ras des pâquerettes, les situations les plus invraisemblables qui passent du coup comme une lettre à la poste. Soyons clairs, le scénario n’est pas fait pour être plausible et si nous marchons malgré tout, c’est bien parce que la réalisatrice assume sans complexe, avec jubilation même, les rebondissements les plus acrobatiques de son histoire (par exemple, le court- circuit de la machine à café qui provoque l’amnésie totale de Samir !!! ou encore la tirade de Samir en faux délégué israélien !!!). À nous spectateurs d’en faire autant. Nous sommes priés de laisser l’esprit de sérieux au vestiaire. Le film démarre sur les chapeaux de roue, avec une scène d’exposition qui suffit à planter le décor et à croquer les deux personnages principaux. Elle, qui n’est pas près de s’en laisser conter, du haut de son mètre cinquante, 40 kilos tout mouillé, c’est le cas de le dire. Lui, grand dadais timide et empoté, qui a néanmoins- on va vite s’en rendre compte- de la suite dans les idées. Mais, si le film emporte aussi facilement notre adhésion, c’est avant tout grâce à la tendresse avec laquelle Solveig Anspach filme tous ses personnages. Il y a une grande délicatesse dans la manière dont la caméra dessine les visages et les corps, sans la moindre affectation. Pas de maniérisme esthétisant ici. Pas de formatage festivalier, mais une écriture directe et chaleureuse. Les images filmées sous l’eau en sont l’exemple le plus frappant. Ce qui aurait pu être un effet de style facile est au contraire pleinement significatif. Contraste entre ce qui se passe de part et d’autre de la ligne de flottaison. Indices volés au visible. Extension de la perception. Respiration /apnée comme une métaphore de l’amour... Mais, comme nous sommes chez Solveig Anspach, la drôlerie n’est jamais bien loin. Et Samir Guesmi en équilibre sur ses deux tabourets pour apprendre les mouvements de la brasse est tout simplement irrésistible. Ce qui néanmoins vraiment tout le prix de L’Effet aquatique, ce sont les plans, nombreux, où s’exprime le métier de Solveig Anspach et son amour du cinéma, avec un sens du cadre et de l’éclairage qui, pour n’être pas nécessairement spectaculaire, n’en est pas moins très sûr. ( Les plans de la piscine vide, avec une géométrie très fine des lignes de fuite ou les reflets sur l’eau, pour ne citer que quelques exemples). La réalisatrice sait parfaitement tirer partie de l’atmosphère de ce lieu clos -entre bulle et cocon- avec tout son petit monde, ses codes et ses rituels. Elle a d’ailleurs elle-même cité Deep End comme source d’inspiration, avec ici l’Islande en échappée belle, loin, très loin du huis-clos tragique de Skolimowski.

En effet, après cette première partie très montreuilloise, avec moult clins d’œil au mode de fonctionnement de cette ville emblématique de la ceinture rouge de Paris ( à commencer bien sûr par le « Centre Nautique Maurice Thorez » lui-même), le film bascule d’un coup, d’un seul, dans le pays d’origine de Solveig Anspach. Grands espaces, nature volcanique et mœurs politiques aux antipodes des nôtres, c’est l’exotisme assuré avec ici, le contre-point du dépaysement en version comique. Le duo qui se partage la charge de conseiller municipal est évidemment en tout point impayable. À partir du moment où nous sommes en Islande, le film va multiplier les situations absurdes dans une spirale dont on ne demande bien où elle va s’arrêter. Ce sera bien sûr dans une source d’eau chaude, couleur locale et effet aquatique obligent. Mais entre temps, nous aurons eu droit à une vielle dame qui lit dans le marc de café, un ado en rupture de ban qui produit du foie gras !! un faux délégué israélien et un vrai délégué palestinien qui veulent construire ensemble une piscine, quelques scènes de drague et de jalousie improbables et cerise sur le gâteau, l’amnésie totale de Samir, dont on se demande bien si c’est du lard ou du cochon et si ce n’est pas comme par hasard, un nouveau « truc » pour séduire Agathe... Un bémol peut-être, le film ne tire pas pleinement partie des somptueux paysages islandais et dans son désir louable de ne pas tomber dans la carte postale, Solveig Anspach ne s’autorise pas un final qui aurait pu être romantique en diable, rien que par le cadre somptueux dans lequel il se déroule. Mais c’est sans doute la retenue scandinave !

Dès le commencement de l’écriture, Solveig Anspach et son coscénariste Jean-Luc Gaget voulaient donner forme à une histoire transportant le spectateur d’un monde aquatique domestique (la piscine de Montreuil) à un monde aquatique sauvage (les sources chaudes islandaises) pour souligner le passage à l’état amoureux des deux héros.

Solveig Anspach voulait faire un film combinant burlesque et comédie romantique, en harmonisant ces deux « sources » d’inspiration souvent contradictoires. "La comédie est un long parcours semé de doutes, car un ou deux ans séparent le moment où l’on écrit une scène, et celui où le public dans la salle réagit, ou pas, à cette scène une fois tournée. Cette expérience, même si elle ne doit pas s‘ériger en système, m’a permis de mieux juger du bon équilibre entre réalisme, comédie, burlesque et émotion", confie la cinéaste. Le film témoigne aussi de l’envie de Solveig Anspach de retrouver l’énergie propre à l’Islande qui est son pays d’origine. La réalisatrice confie qu’elle voulait replacer les personnages dans les grands espaces, les confronter aux éléments au sein d’une histoire à la fois drôle et touchante.

Au moment de l’écriture du film, Solveig Anspach et Jean-Luc Gaget sont tombés amoureux de Deep End de Jerzy Skolimowski (1970) et la première explique que ce film a été l’élément déclencheur pour L’Effet aquatique : "Il se passe dans une piscine et nous parle du trouble qu’on peut ressentir dans ces endroits « aquatiques ». C’est ce trouble très spécifique que nous avons voulu explorer ici. Car une piscine est un lieu très particulier, apparemment hors du temps, qui met en présence des populations diverses aux motivations parfois énigmatiques. Moiteur libidinale, humidité pénétrante, sols glissants, torpeur indicible, rituels immuables, la piscine a sur certains des effets insolites. On y vient principalement pour nager, c’est une idée répandue, mais on y croise aussi d’autres desseins plus inavouables. Une piscine est un lieu hautement démocratique car les signes d’appartenances sociales ou religieuses ont disparu sous les maillots de bain moulants. Elle n’en reste pas moins un endroit où les luttes de pouvoir s’expriment sans fards, et où le monde moderne émet un écho singulier. En suivant nos deux personnages et leur quête éperdument amoureuse, nous voulions aussi dresser le portrait d’une tribu étrange, familière et souvent cocasse, celles des maîtres-nageurs."

Samir Guesmi retrouve la regrettée réalisatrice islandaise qui le dirigeait ici pour la 2ème fois après Queen of Montreuil, dans lequel il donnait déjà la réplique à sa partenaire de L’Effet aquatique, Florence Loiret-Caille. Comme il en a été de même pour ses deux précédentes comédies, Back Soon et Queen of Montreuil, Solveig Anspach voulait qu’il y ait dans L’Effet aquatique des acteurs et des acteurs non professionnels français, islandais et même Palestiniens qui ont été poussés à improviser.

L’Effet aquatique a été présenté au festival de Cannes 2016 à la Quinzaine des réalisateurs. Solveig Anspach est une habituée de la croisette puisque son documentaire sur la peine de mort Made in the USA était sélectionné à la Quinzaine et le drame Stormy Weather à Un certain regard.


Présentation du film et animation du débat avec le public : Josiane Scoleri

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